Nicolás Rubió (1928-2024) à La Contemporaine
Décédé en septembre 2024, Nicolás Rubió est présent dans les collections de La Contemporaine grâce à un don de 2008, effectué par Nicolás et Jacques Rubió, comprenant deux œuvres importantes et des documents liés au séjour d’exil de la famille Rubió à Vielle, lieu-dit de Ytrac dans le Cantal (où se trouve désormais une rue Nicolas Rubió) entre 1940 et 1948.
L'Auca del home que escampava la boira et L’home que escampava la boira : Auca a la gloria de Santiago Rubio i Tuduri per el seu fill
Les deux séries de tableaux donnés par Nicolás et Jacques Rubió sont :
- Auca del home que escampava la boira, 1981. Huile sur panneau, 48 pièces de 30x36 cm.
- L’home que escampava la boira : Auca a la gloria de Santiago Rubio i Tuduri per el seu fill, 2005. Huile sur panneau, 12 pièces de 51x51 cm.
Ces œuvres constituent une biographie illustrée sur panneaux de Santiago Rubió i Tudurí (1892-1980), le père de l’artiste, né en Catalogne, exilé dans le Cantal puis en Argentine avec sa famille. Ingénieur catalan et pionnier des transports publics, il était directeur du métro de Barcelone dont il a dirigé les travaux de la première ligne du réseau, exilé en France entre 1939 et 1948, puis en Argentine.
Il s’agit d’œuvres picturales multiples qui se distinguent, notamment pour la première, par leur aspect formel, celui de l’auca. L’auca en catalan, ou aleluya en espagnol, est un genre graphique et littéraire propre à l’Espagne et largement cultivé en Catalogne. Il se présente habituellement sous la forme d’une feuille imprimée, portant une succession de 48 dessins accompagnés chacun par deux vers, généralement heptasyllabiques, avec des rimes.
Auca, qui veut dire « oie » en catalan, vient du jeu de l’oie car elle présente comme ce dernier une succession séquentielle d’images consacrées à un thème particulier, dans notre cas, biographique, ce qui en fait un des ancêtres de la bande dessinée. Les auques (pluriel catalan de auca) sont un genre de littérature populaire de colportage qui fut très en vogue au XIXe siècle et qui se perpétue encore aujourd’hui.
Il n’est donc pas étonnant que Nicolás Rubió, artiste très attaché aux arts populaires, au folklore et qui a dénoncé tout au long de sa vie le divorce entre l’art d’avant-garde et le peuple, ait choisi la forme populaire de l’auca pour rendre hommage à son père, d’autant plus que la tradition satirique et caricaturale du genre lui permettait d’évoquer son père avec à la fois tendresse et ironie. Mais ce qui différencie l’auca de Nicolás Rubió des exemples traditionnels, c’est le support : elle est composée de 48 peintures et non pas de 48 dessins ou gravures.
Aldo Battaglia
18 décembre 2024
Pour aller plus loin
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