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Les années 1936-1938 à travers les dessins de Sennep

Les années 1936-1938 à travers les dessins de Sennep

Dossier réalisé par Olga de March (Université Paris-Nanterre - L3 "Histoire en action").

L’entre-deux-guerres est le théâtre de nombreux bouleversements. Après une période de reconstruction et d'accalmie, les crises touchent de nouveau l'Europe. Les indicateurs économiques et sociaux laissent présager le pire. Ce sont ensuite les régimes politiques instables qui se brisent et laissent place à de nouveaux acteurs qui transforment dangereusement les sociétés occidentales. Dès les années 1920, des régimes autoritaires se mettent en place, notamment en Europe de l'est et en Italie. La décennie suivante voit sombrer d’autres régimes qui, trop faibles, laissent ainsi le champ libre aux totalitarismes.

Ce dossier s'intéresse à la montée de ces tensions multiples à travers le fonds d’archives de la Contemporaine qui conserve les dessins de presse réalisés par le caricaturiste Jean Sennep, personnage complexe et très représentatif de la période.

Né à Paris en 1894 et décédé presque un siècle plus tard, en 1982, Sennep collabore durant l’entre-deux-guerres à de nombreux journaux, dont Candide et Paris Soir Dimanche. Candide est l’un des principaux hebdomadaires de cette période. Il traite essentiellement de politique et affiche des idées très conservatrices, voire racistes. Dès 1934, le journal renforce ses positions et se radicalise encore davantage. Tout comme une grande partie de la société, Candide n’hésite pas à développer des thématiques anti-communistes, racistes, xénophobes et antisémites, voire antirépublicaines. Ces positions lui valent un succès grandissant durant l’entre-deux-guerres. Paris Soir est fondé quant à lui en 1923 par un anarchiste, Eugène Merle. Les pages dans lesquelles publiait Sennep, Paris Soir Dimanche n’ont existé qu’entre 1935 et 1939. Ce journal connut rapidement un grand succès grâce à ses pages aérées, rares pour l’époque, et la large place qu’y tenait l’illustration. Ce périodique doit être vu avant même d’être lu, selon son slogan. Cela explique d’ailleurs que l’on trouve dans le fonds Sennep de nombreux dessins pour Paris Soir datés du même jour.

L’art de la caricature est ancien et a, au cours de toutes les époques, suscité le rire autant que les tensions, tout en dénonçant parfois des événements d’une réelle gravité, comme nous allons le voir dans ce corpus de dessins révélateurs des dérives fascistes en Europe.

Critique des politiques de gauche et diplomatie européenne face à l'Allemagne 

A travers plusieurs caricatures, Sennep effectue une critique des hommes politiques de gauche du Front populaire. Sennep dépeint souvent les réformes du Front Populaire comme naïves ou irréalistes, mettant en lumière les difficultés de leur mise en œuvre. Il critique le pacifisme du Front Populaire, le considérant comme une faiblesse face à la montée des régimes autoritaires en Europe.

Outre cette critique, Sennep dénonce la diplomatie européenne face à la montée du nazisme qui ne parvient pas à stopper Hilter, ainsi que le rôle du ministre des affaires étrangères par rapport à la politique expansionniste de l'Allemagne. 

Les deux personnages représentés sur ce dessin sont Jean Zay (ministre de l’Education nationale et des Beaux-Arts) et Léon Blum, qui dirige le gouvernement de Front populaire depuis juin 1936. Ce dessin est intitulé « Au comité Amsterdam-Pleyel », en référence à la salle Pleyel, salle de concert parisienne, et au « comité Amsterdam ». Le comité Amsterdam a été créé en 1932 à l’initiative d’Henri Barbusse, dans le but de s’opposer à la guerre et de prôner la paix en Europe. Malgré une certaine opposition des socialistes qui s’inquiètent du rôle de premier plan qu’y joue le parti communiste, le comité se réunit en 1933 dans la salle Pleyel, à Paris – et prend alors le nom de « comité Amsterdam-Pleyel ». Dans les années qui suivent, le comité affiche nettement une position antifasciste, mais ne parvient pas véritablement à incarner une politique efficace contre la montée des périls. C’est cette déception que traduit Sennep grâce à sa légende «  Voilà !... rien que des soupirs », et à l’attitude désemparée de Léon Blum contraint d’exécuter au piano une partition où ne figurent que des silences (des « soupirs », justement), tenue par son ministre des Beaux-Arts, dont l’influence politique est ainsi suggérée. Ce dessin, plus largement, cible essentiellement Léon Blum : en effet, le parti de ce dernier est l’une des causes de l’échec de l’union de la gauche contre le fascisme. La SFIO refuse de participer en 1934 à ce rassemblement et crée un contre mouvement qui ne se réclame d’aucune organisation.

Dessin de Maurice Thorez vendant des cravates, souriant et disant "3 pour 6 francs et à bas Mussolini"
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Candide 1938) (Cote : SEN 4 (1-73))

Sennep se moque directement du charismatique leader communiste Maurice Thorez, qu’il représente sous les traits d’un homme beau, hâbleur et élégant : Thorez mettait un point d’honneur à porter la cravate et le faux-col, notamment pour se rendre à l’assemblée, ce qui pouvait surprendre pour un élu communiste – et ce que Sennep ne manquait jamais de rappeler, comme il le fait ici. Cette représentation peut paraître flatteuse mais le caricaturiste dénonce ici l’attitude d’un politicien qu’il présente comme un vulgaire vendeur à la criée, prêt à tous les marchandages pour vendre ses idées comme on vend des cravates – mettant au passage en doute la sincérité d’un « et à bas Mussolini » qui parait ici n’être qu’un élément parmi d’autres d’un discours bien rôdé de bonimenteur, présenté comme une petite prime offerte pour emporter l’adhésion d’un « acheteur / électeur » potentiel.

Dessin d'un chien avec la tête d'Hitler qui court en emmenant avec lui la Villa Europe à laquelle il est enchaîné, en allant vers un tout petit Russe en haillons
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Sennep caricature la diplomatie européenne qui, malgré ses hauts cris, ne parvient pas à stopper la course folle d’Hitler qui entraîne l’Europe vers la guerre et le chaos. Derrière cette première lecture, se dessine aussi l’image de la puissance hitlérienne, animalisée mais redoutable comme un chien féroce, face à une Russie qui, par bien des aspects, semble à cette époque ne pas être en mesure de s’opposer à une éventuelle attaque allemande.

Dessin d'une roulette dont les parties portent le nom de pays (France, Italie, Russie, Allemagne, etc). La boule est remplacée par la tête d'Anthony Eden.
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Ce dessin devait être publié dans Paris Soir Dimanche, mais pour une raison inconnue cela n’a pas été le cas. Il est daté du 11 octobre 1936. Cette caricature intitulée «  La roulette de Monte-Carlo » représente un seul visage, celui d’Anthony Eden. Membre du parti conservateur britannique, il a occupé de nombreux postes dont celui de premier ministre après la fin du second conflit mondial. La veille de la publication, Eden était à Paris afin de rencontrer Léon Blum au sujet du traité de non intervention en Espagne, destinée à éviter un embrasement général de l’Europe sur le terrain espagnol. Sennep dénonce la complexité des négociations menées par Eden à travers toute l’Europe, sautant d’un pays à l’autre comme une boule de roulette. Le fait que la tête d'Eden soit finalement positionnée sur l’Allemagne n’est évidemment pas un hasard : ce traité était considéré par beaucoup comme une victoire de l’Allemagne qui put, de fait, soutenir par la suite presque sans entraves le combat de Franco. C’est Anthony Eden qui est représenté et non d’autres hommes politiques puisqu’il est ministre des affaires étrangères de l’Angleterre, à l’origine de cette politique de non-intervention. Il fut le principal artisan de la fondation du comité de non-intervention en Espagne, basé à Londres.

Caricature d'Yvon Delbos, représenté comme un enfant qui tient dans sa main une girouette en forme de croix gammée. Il y a un point d'interrogation au dessus de sa tête.
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Candide 1938) (Cote : SEN 4 (1-73))

Sennep a ici caricaturé Yvon Delbos. Ce dessin dénonce la complaisance du ministre des affaires étrangères à l’égard de la politique expansionniste de l’Allemagne, même s’il se montre plus indulgent que celui publié dans le même journal le 24 février. En effet, la girouette en forme de croix gammée et le point d’interrogation au dessus d’Yvon Delbos marquent encore une hésitation quant à l’attitude à adopter face à la férocité nazie. Cependant, le caricaturiste dénonce déjà l’attitude du parti radical. D’une part, Sennep critique l’hésitation des politiques et plus généralement de la France, quelques mois avant les accords de Munich. D’autre part, la forme de la girouette que tient Yvon Delbos dénonce clairement le parti-pris de l’homme politique. En effet, le France aimerait grâce à des stratégies diplomatiques éviter un conflit armé qui nuirait à l’Europe tout entière.

Anti-communiste et menace totalitaire

Sennep représente le communisme comme une menace à la démocratie et aux libertés individuelles, illustrant souvent des scènes de répression et de contrôle social.

Caricature de Staline qui tend un marteau vers un croissant de lune, devant un paysage qui évoque la Turquie
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))
Caricature de Staline caché sous un lit, un téléphone à la main, un pistolet près de lui
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : EN 10 (1-39))

Un des exemples que nous pouvons observer est ce dessin dont le but est de dénoncer la menace croissante du dictateur soviétique, Staline, à l’égard de la Turquie, qui tente alors de se maintenir dans une situation de neutralité qui déplait fortement à la Russie.

Staline, muni d’un marteau, tente de frapper sur le croissant de lune. La ligne d’horizon qui représente une ville orientale rappelle la Turquie, dont le drapeau est justement constitué d’un croissant et d'une étoile. Ce pays entretenait alors des relations complexes et conflictuelles avec la Russie de Staline. Le caricaturiste joue ici avec les symboles. Le croissant associé au marteau que brandit Staline rappelle évidemment le symbole communiste, la faucille et le marteau. De plus, la présence d’étoiles fait également référence à l’étoile rouge du drapeau communiste – étoile que l’on voit sur la poitrine du chef d’Etat, et qui symbolise pour les socialistes l’union de tous les travailleurs.

Ce dessin a été réalisé pour Paris Soir Dimanche. Il devait paraître le 30 août 1936, mais pour des raisons inconnues il n’a finalement pas été publié. On y voit Staline, caché sous un lit, équipé d’un téléphone et d’une arme. Sennep fait sans aucun doute référence aux procès de Moscou, simulacre de justice pour les opposants au dictateur. En effet, les condamnés sont exécutés le 25 août, soit 5 jours avant ce dessin. Cette caricature présente le dictateur sous les traits d’un conspirateur de bas étage, caché sous son lit. « Le règne de Staline » évoqué par la légende est ici présenté comme le règne d’un vulgaire criminel, pratiquant la délation et l’exécution sommaire - l’arme à ses côtés rappelant aux lecteurs que Staline arriva au pouvoir par la violence.

Critique et dénonciations des régimes totalitaires 

Sennep caricature fréquemment les dictateurs fascistes, Hitler et Mussolini, soulignant leur brutalité et leur propagande, et met en garde contre la montée des régimes fascistes, représentant souvent leurs leaders de manière grotesque pour accentuer leur menace.

Caricature de Ciano, représenté nu, de dos, devant un champ labouré dans le quel a été tracée une croix gammée, entourée d'un cercle. Légende : "le comte Ciano ou le nouveau Romulus"
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Sennep représente ici le comte Ciano. C’est un proche de Mussolini, fasciste de la première heure qui gravit rapidement les échelons, tout d'abord en épousant une des filles du dictateur italien. Ministre de la propagande, il signe en mai 1939, pour l'Italie, le pacte d'acier ou traité de Berlin, qui scelle l'union entre l'Italie fasciste et l'Allemagne nazie. L'illustrateur compare Ciano à Romulus, fondateur de Rome. Le ministre fonde en réalité ce qui devient en 1939 un véritable axe fasciste européen. En effet, le comte Ciano est chargé d’établir un lien fort menant à une alliance entre l’Italie et l’Allemagne en rencontrant à de nombreuses reprises le Führer. Via la métaphore de la construction de Rome (délimitée par le tracé d’une charrue) avec le dessin de la croix gammée utilisée par Hitler, Sennep critique fortement la position italienne qui, de fait, place l’Italie dans la dépendance de l’Allemagne.

Caricature d'un homme, qui porte un brassard nazi et une serviette de serveur sur le bras, désignant une assiette dans laquelle se tient un petit canon et disant "Le Krupp remplace le beurre !"
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Sur ce dessin est représenté Rudolf Hess, secrétaire d'Hitler qui l'avait désigné comme son dauphin. L'illustrateur lui fait dire que le beurre est remplacé par le Krupp. Krupp est une entreprise d'acier allemande qui s'est alliée aux nazis, fabriquant ainsi de nombreuses armes telles que le canon ici représenté. Ce dessin tente donc d'expliquer que toute l'économie change avec le conflit mondial et que l'on assiste au développement d'une économie de guerre, privilégiant les dépenses militaires. L'exemple du beurre est significatif, puisqu'il est considéré comme un élément de base de l'alimentation. Nous pouvons également supposer que ce dessin est une réaction aux évènements survenus quelques jours plus tôt. En effet, le 6 octobre, le chef du gouvernement hongrois meurt. Son successeur est alors contraint par Hitler à adopter la politique nazie et lance un vaste programme de réarmement de la Hongrie.

Caricature décrite dans le texte
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Ce dessin a été publié le 13 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche. La même semaine que la publication de ce dessin se tenait le 8e congrès du parti nazi à Nuremberg durant lequel le parti accentua davantage sa politique de réarmement en vue d’une guerre. De plus la rime enfantine entre joujou et chouchou rappelle que le congrès est largement dirigé en direction de jeunesse. Ce grand rassemblement était une nouvelle occasion pour le parti d’étendre son influence et d’inculquer son idéologie essentiellement à la jeunesse qui constitue une armée forte, motivée et nombreuse pour combattre les juifs ou encore le bolchevisme, principaux ennemis du régime. On y voit Hitler au centre. Les congrès du parti nazi donnaient toujours lieu à de spectaculaires mises en scène. Il est caricaturé tel une figurine pour enfant, en référence à la production importante de jouets à cette époque dans la ville de Nuremberg. La légende « le chouchou de Nuremberg » accentue le ridicule du dessin. Le dictateur est entouré de bras tendus, faisant le salut nazi. Il est inscrit « Heil » référence au nazisme qui a déjà envahi la population et à l’adoration que portait une partie des Allemands au dictateur.

Caricature décrite dans le texte
4. (Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Ce dessin a été publié dans Paris Soir Dimanche le 11 octobre 1936. On y voit le dictateur italien, Benito Mussolini faisant un salut fasciste. A ses pieds, on peut observer un petit personnage dont la tête a été remplacée par une pièce de monnaie. Il s’agit de la lire, monnaie italienne. Le titre « la lire Balilla » fait référence à l’histoire italienne. En effet, Balilla est le surnom de Giovani Battista Perasso, jeune homme qui aurait déclenché la révolution italienne de 1746 se battant contre l’occupation autrichienne. Le dictateur se sert de ce symbole pour illustrer le courage italien et utilise ce surnom pour nommer son organisation de jeunesse. Comme les jeunesses hitlériennes, cette organisation a pour but d’inculquer dès le plus jeune âge le culte du chef, la doctrine fasciste ainsi que le culte du corps et l’envie de se battre pour sa patrie. Ici, Sennep dénonce ce système et la soumission du peuple au dictateur et la volonté de contrôle du Duce jusque dans le système monétaire qui sert entièrement la politique de remilitarisation de l’Italie.

Sur cette caricature, publiée le 27 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche, on reconnaît le dictateur allemand Adolf Hitler. Le dessin intitulé « Le Locarnivore » dénonce le non-respect du traité de Locarno par l'Allemagne. Le traité de Locarno, signé en octobre 1925, prévoyait entre autres le maintien des frontières de l'époque. En signant ces accords et en les ratifiant, l'Allemagne s'engageait donc à ne pas violer les frontières établies, en particulier celles de la Tchécoslovaquie et de la Pologne, même si le régime nazi ne les reconnaissait pas. Cependant, le 7 mars 1936, les troupes hitlériennes avaient brisé une première fois ces accords en envahissant la Rhénanie, zone démilitarisée depuis le premier conflit mondial. Ainsi, par son dessin, le caricaturiste souhaite montrer comment les troupes hitlériennes, en toute impunité, ont mit fin à ces accords qui ont tenté en vain de préserver la paix en Europe. Le titre de ce dessin «  Locarnivore » rappelle le terme de carnivore qui donne un caractère bestial et féroce à Hitler.

Caricature décrite dans le texte
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Ce dessin a été publié le 20 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche. On y voit Mussolini dans un canon faisant le salut fasciste. Sennep, en dessinant Mussolini dans cette position tente d’avertir sur la dangerosité potentielle du Duce. Ensuite, la légende du dessin « le dernier balcon où l’on cause » fait sans doute référence aux négociations en cours avec l’Allemagne afin de créer un axe Rome-Berlin qui servirait les intérêts des deux puissances fascistes. Ces discussions laissent donc présager que le dialogue n’est plus possible avec l’Italie. Mais Sennep fait surtout référence aux nouveaux crédits accordés à l’armement. En effet durant tout le mois d’août, le conseil des ministres italien a discuté sous les ordres de Mussolini des nouveaux crédits à allouer à l’armement et à la défense. 

Démystification du pouvoir allemand via la figure de Göring 

Göring était un des plus proches collaborateurs de Hitler. Cet homme politique allemand nazi fut plusieurs fois ministre pour le compte du IIIe Reich. En 1936, il cumule de nombreux postes : Il est député, ministre des forêts, président du Reichstag, ministre de l’aviation mais aussi ministre-président puis Reichsstatthalter (autrement dit gouverneur) de Prusse.

Sennep caricaturait Göring non seulement pour critiquer l'individu mais aussi pour attaquer symboliquement l'ensemble du régime nazi, exposer ses crimes, et encourager la résistance à l'oppression. Ces caricatures étaient des actes de courage et de défiance, visant à inspirer et à unir ceux qui s'opposaient à la tyrannie.

Caricature de Göring, représenté comme un homme gros et arborant des décorations, assis sur une balançoire, dont le poids semble éjecter de la balançoire Schacht, un petit homme
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Cette caricature publiée le 11 octobre 1936 dans Paris Soir Dimanche représente Göring et Schacht, deux figures du IIIe Reich. Schacht fut également au service du régime nazi en tant que ministre de l’économie entre 1934 et 1937.

Ce dessin, publié un an avant l’éviction de Schacht, traduit le fait que les choix politiques de Göring en faveur des dépenses d’armement l’emportent largement, dès cette époque, sur la politique de rigueur économique défendue par Schacht. Il se moque également du physique peu gracieux de Göring qui, on le sait, était très corpulent, pesant ainsi plus que son concurrent dans la balance.

Caricature d'Hitler face à Göring, représenté comme un homme gros dont les médailles sont remplacées par des petites casseroles, les rubans par un chapelet de saucisses et le képi par une toque de cuisinier. Hitler : "je trouve le rata excellent" et Göring : "J’ai cru devoir me faire confectionner un uniforme de maréchal des cuisiniers"
(Fonds Sennep. Dessins de presse. Paris Soir Dimanche 1936) (Cote : SEN 10 (1-39))

Sur cette caricature publiée dans Paris Soir Dimanche le 11 octobre 1936, on peut reconnaître Hitler et Göring.

Sennep se moque dans cette caricature des cumuls de fonction de Göring. En effet, il fait dire la phrase suivante au dignitaire nazi : « J’ai cru devoir me faire confectionner un uniforme de maréchal des cuisiniers ». Cette phrase fait écho à celle d’Hitler qui se dit satisfait du rata. Le rata est un ragout grossier généralement peu apprécié. Le fait d’avoir réussi un rata excellent selon Hitler, permettrait alors à Göring d’obtenir une nouvelle fonction, celle de maréchal des cuisiniers. Cette moquerie est accentuée par le détournement des attributs de cuisiniers tels que la toque, les casseroles ou encore les saucisses qui parodient les insignes, uniformes et médailles attribués normalement à un militaire pour ses actes de bravoure ou sa bonne conduite.

Ce dessin a été publié le 9 septembre 1936 dans Paris Soir Dimanche. On y voit ce qui ressemble à une corrida puisqu’un taureau dont les cornes sont remplacées par des poings levés est représenté au milieu de la piste : le taureau, puissant mais par avance condamné à être mis à mort, est de toute évidence une représentation de la gauche espagnole. Les spectateurs présents sont, dans l’ordre : le général Franco, Mussolini, Hitler, Staline et Blum. Au bas de la caricature nous pouvons lire le poème suivant : « Le cirque est plein, c’est jour de fête ! Le cirque est plein de haut en bas… Les spectateurs perdent la tête, s’interpellent à grands fracas ». Ce texte décrit parfaitement la posture des protagonistes : alors que Mussolini pousse Franco à entrer dans l’arène pour mettre à mort le taureau républicain, Staline retient Hitler qui fait mine de vouloir y aller et lui intime l’ordre de sortir – tandis que Léon Blum retient pour sa part Staline par la veste, rappelant par ce geste son attitude attentiste face aux demandes d’intervention formulées par les communistes français.

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