Opération d’envergure lancée par les forces britanniques lors de la Grande Guerre, la Bataille de la Somme est la première offensive conjointe franco-anglaise : les 48 albums consacrés au département de la Somme reflètent cet engagement en intégrant de nombreuses sources britanniques.
En complément des images produites par les photographes français, opérateurs de la Section photographique de l’armée, sont également compilés dans les albums de la Somme des clichés provenant du Daily Mirror et du War Office Cinema Committee (London) mais surtout les photographies réalisées par les professionnels accrédités officiellement par l’Armée britannique : celles si sont décrites dans l’Argonnaute par la mention British Official Photo, suivie de la référence du cliché conservé à l’Imperial War Museum.
Si la photographie est de plus en plus prisée par les lecteurs anglais, et si de nouvelles publications répondent alors à ces besoins en se spécialisant dans les reportages illustrés comme The War Illustrated créé le 22 août 1914, ce n’est qu’en 1916 que les premiers photographes officiels sont envoyés sur le Front. Un an après la création en France des sections photographique et cinématographique, le War Office (Bureau de la Guerre) décide non pas de créer une section mais plutôt de former une élite d’une douzaine de photographes chargés de suivre les troupes britanniques et de documenter l’effort de guerre. Contrairement aux opérateurs français de la Section photographique de l’armée qui restent souvent soldats de 2ème ou 1ère classe, au mieux caporaux, les photographes officiels britanniques sont automatiquement intégrés comme officiers. Soumis à la discipline militaire, ils sont toutefois relativement libres dans le choix de leurs reportages, la censure s’exerçant plutôt a posteriori, avant la publication de leur travail.
Le premier photographe à couvrir officiellement la Bataille de la Somme est Ernest Brooks (1878-1936). Ancien journaliste au Daily Mirror il était déjà connu pour ses photographies réalisées lors de la Bataille de Gallipoli. Les archives de la SPA conservées à la BDIC gardent trace d’un échange de courriers entre le ministère français de la Guerre et Ernest Brooks qui donne en avril 1916 un lot de tirages pris sur la plage de Seddul-Bahr (Turquie). Il produit des milliers d’images de 1916 à 1918, soit plus de 10% des photographies officielles britanniques réalisées lors de la Grande Guerre.
Le 1er juillet 1916 il est le seul professionnel présent auprès des troupes britanniques lors du déclenchement de la Bataille de la Somme : ses photographies des violents combats à Beaumont Hamel sont particulièrement célèbres et consultables sur le site de l’Imperial War Museum : c'est là en effet que l'armée anglaise utilise pour la première fois en quantité importante l'ammonal (un nouvel et puissant explosif à base de nitrates, de TNT et d'aluminium) dans la mine de la redoute d'Hawthorn Ridge. Ernest Brooks revient sur les lieux le 26 novembre 1916 et photographie l’énorme cratère provoqué par l’explosion de 18 tonnes d'ammonal, qui ont pulvérisé une position allemande.
Second photographe officiel missionné par le War Office, et dont une partie du travail est consultable au sein des albums de la Section photographique de l’armée, John Warwick Brooke accompagne très vite Ernest Brooks sur le Front. Issu de la Topical Press Agency, il réalise plus de 4000 photographies, de la Bataille de la Somme à la Libération de la France, en passant par la Bataille d'Albert du 21 au 23 août 1918.
On peut également signaler la présence sur le sol français d’Armando Consolé, qui est notamment témoin de la rencontre en avril 1918 entre Douglas Haig et Clemenceau à Doullens, au Quartier général britannique.
En 1917, au moment où en France le couple Leblanc décide de faire don de sa collection à l’Etat, pour créer la Bibliothèque-Musée de la guerre qui deviendra ensuite la BDIC, les autorités anglaises décident de créer un musée national dans un but commémoratif mais avec également la ferme volonté de conserver la documentation créée pendant le conflit : en mars 1917 est annoncée la création d’un musée national de la guerre qui prendra en décembre le nom d’Imperial War Museum. Les photographes officiels britanniques sont donc très vite conscients que leur travail sur le terrain ne répond pas seulement aux besoins de l’information et de la propagande, mais sera ensuite archivé pour servir de sources aux historiens et aux générations futures.
Pour compléter ce billet, nous vous conseillons la lecture de l’ouvrage qui fait référence sur ce sujet, First World War Photographers de Jane Carmichael.
Consulter l'ensemble des albums Valois consacrés à la Somme
Cyril BURTE